Hier matin, parce qu'il ne faisait pas aussi chaud qu'en août et que j'en remettais une couche[1], après que j'avais avalé du café qui peinait à rester chaud bien que j'aie pris soin de lui mettre une écharpe, je me suis dit que l'époque était on ne peut pas plus propice pour tester une plume retrouvée récemment. Je l'ai fichée au bout d'un porte-plume et j'ai ouvert le flacon d'encre de chine. Dans un premier temps, j'ai encré un dessin qui traînait là et j'ai été assez satisfait. J'ai continué par un autre dessin puis un autre déjà plus ambitieux. Tout cela me satisfaisait. Alors, j'ai pris le crayonné du dessin que vous pouvez voir ici et j'ai laissé courir la plume sur le papier.
Si je suis plutôt adepte du pinceau, je trouve au moins un avantage à la plume : il n'y a pas besoin de passer les mains sous l'eau pour la nettoyer et moi, quand il ne fait pas chaud[2], je n'aime pas avoir les mains dans l'eau. La plume est paradoxale ou du moins différente au pinceau. D'un côté, elle peut être plus précise et plus prévisible que le pinceau, de l'autre elle me semble moins à l'aise pour les tracés longs. Elle accroche plus que le pinceau et est plus susceptible de produire des traits indésirables. Cependant, le pinceau est capable du pire lui aussi.
Vous me direz que je pourrais utiliser les deux solutions pour les opérations qui leur conviennent et je vous répondrai que vous avez raison. Nonobstant, parce que je déteste avoir tort, je rétorque que je fais bien comme je veux.

Trois chevaux fiscaux
A la fin des années 50, la gamme des automobiles Citroën se limitait à la DS et à la 2cv. Si la DS n'avait aucune difficulté à concurrencer la Frégate de chez Renault, la 2cv ne parvenait pas tout à fait à convaincre celles et ceux qui lorgnaient sur la 4cv et et la Dauphine. Il est alors décidé de produire un modèle qui prendrait une place dans le milieu de gamme. Par souci d'économie, on part sur la plate-forme de la 2cv et on gonfle le moteur pour plus de puissance. Il faut au moins cela pour permettre au nouveau projet d'atteindre des vitesses décentes. C'est que l'AMI est bien plus lourde que la 2cv, bien mieux équipée aussi. Cette nouvelle automobile atteint alors la barre des 100 km/h et rivalise avec les Renault. Elle sort en 1961, l'année de la sortie de la Renault 4 qui se révèlera être la vraie concurrente. C'est la ligne particulière de l'AMI, l'inclinaison de la lunette arrière en premier, qui sera le gros sujet. L'équipe de marketing parviendra à faire remarquer que cette lunette arrière a pour principal avantage de ne pas se couvrir de neige… lorsqu'il neige.
Dès lors, on se demande si la présence des skis sur la galerie du modèle présenté lors des Vintage Days est un rappel discret à cet avantage indéniable.

Selon le calendrier républicain, nous sommes le jour du coing
Abandonné à son triste sort sur une île déserte
Luxe en 1930 en Ford A
Machine à générer de l'intelligence
J'ai été informé de la chose hier. J'écoutais David Dufresne qui s'entretenait avec Olivier Ertzscheld, chercheur français en sciences de l'information et de la communication, à propos des IA, des risques qu'elles peuvent engendrer, des défis qu'elles portent pour l'Humanité.
L'entretien était bien intéressant et au détour d'une phrase durant la conversation a été évoquée une bourde de Patricia Miralles, Ministre déléguée chargée de la Mémoire et des Anciens Combattants du gouvernement Bayrou. Pour rendre hommage aux combattants de la guerre de 14-18 et appuyer son propos, elle (ou son équipe) a choisi de faire appel à une IA pour illustrer son intervention sur X. Patatras ! Boulette ! L'IA en question représente une France joliment bordée de petits cœurs trop mignons et riche de deux péninsules bretonnes.
Sobrement, le mot « HOMMAGE » s'affiche en bas de l'illustration accompagné de bleuets. Et là, même si nous savons nous montrer indulgent, compréhensif et bienveillant, ça tique un peu au moment où l'on s'aperçoit que le soldat représenté, la tête tournée vers l'est, est allemand. Un Allemand, si l'on en croit le casque, de la Seconde Guerre mondiale.
Apparemment, ni la ministre ni son équipe n'ont vu les problèmes et c'est comme ça que la Macronie parvient toujours à nous étonner.

Un moteur de secours dans le coffre
Changement de régime
Ne faut-il retenir de tout cela que le régime alimentaire ? La presse[1] n'a parlé que des yaourts et du thon à l'huile dont l'ancien président se nourrissait à l'exclusion de tout autre aliment alors que, disons-le, ce n'est sans doute pas l'information la plus importante de toute l'affaire. Qu'un ancien président de la République soit envoyé en prison, ce n'est pas rien.
Sarkozy a été remis en liberté en attente de son jugement en appel. Cela prouve que l'état de droit a encore un sens en France. Cette remise en liberté est assujettie à certaines conditions et elle n'est pas la preuve de l'innocence de Sarkozy.

Note
[1] du moins une grosse partie
Les meurtres du prêtre
C'est un livre dont je tiens à vous parler depuis assez longtemps sans trouver la manière de le faire. Il s'agit d'un roman publié pour la première fois en 1966 chez Buchet-Chastel, un livre qui est tombé dans l'oubli avant d'être redécouvert et réédité par Les éditions du Chemin de fer cette année. L'ouvrage en question a été écrit par Hubert Gonnet et il est très probable que vous ne connaissiez pas cet auteur. Le grand scandale est son titre.
De cette nouvelle édition, on peut déjà dire que c'est une belle réussite. Une belle typographie, un beau papier, une mise en pages impeccable. Pour entrer dans le roman, il faut accepter l'idée de l'auteur qui conduit à couper le livre en deux parties qu'il faudrait parvenir à lire dans un même temps. Nous avons le récit qui se lit sur les pages paires et l'intime du "héros" qui occupe les pages impaires, les pages paires et impaires se faisant écho les unes aux autres.
Ce roman s'inspire d'un fait divers survenu en 1956 que l'on appelle "affaire du curé d'Uruffe". Elle met en scène un curé, Guy Desnoyers, qui assassine sa jeune maîtresse enceinte de lui avant de l'éventrer et de tuer à coups de couteau l'enfant qui, l'autopsie le démontrera, était viable. Il prendra tout de même le temps de baptiser la petite fille pour lui garantir une place au paradis.
Le roman ne s'attarde pas à décrire l'horreur des crimes. Ce n'est pas un roman d'épouvante. L'intention de l'auteur n'est pas de faire frissonner, de jouer avec la peur ou le dégoût. Les crimes ont lieu, les gendarmes et les policiers enquêtent, le curé est accusé, le juge d'instruction interroge l'accusé et à la fin, le curé avoue et reconnaît ses crimes. Tout ça est réservé aux pages paires. C'est formel, ça tente tant bien que mal d'expliquer, de comprendre.
Les pages impaires répondent aux pages paires. Dans celles-ci, on entre dans la tête du curé (qui, comme le dit l'auteur, n'est pas celui d'Uruffe pour la simple raison qu'il n'est pas, lui l'auteur, ce curé d'Uruffe). Ici, dans cette moitié de livre, tout n'est donc que spéculations. Hubert Gonnet essaie de se mettre dans la tête d'un curé qui tue sa maîtresse et sa fille pour… Pour quoi ? Pour sauver les apparences ? Par peur du scandale ? Par crainte du déshonneur ? Par folie ? On ne peut pas être dans la tête du vrai curé d'Uruffe. Toujours est-il que les crimes ont eu lieu et que l'on peut comprendre que l'affaire ait marqué Hubert Gonnet jusqu'à le conduire à écrire ce roman en 1966.
Il reste que si c'est bien le curé qui a tiré sur sa jeune maîtresse et a usé d'un couteau pour tuer l'enfant extrait du ventre de sa mère, il est intéressant de se poser la question de la responsabilité de l'Église et de la société de l'époque. Et c'est justement le vrai sujet du roman. Sans prétendre qu'un pareil fait divers serait impossible aujourd'hui, il me semble qu'une histoire de curé qui aurait un enfant ne choquerait pas notre société en dehors des cercles religieux fanatiques. Maintenant, juger le poids de la société d'il y a bientôt soixante-dix ans n'est pas chose facile. Ça devait l'être un peu plus juste dix ans après les faits. Les crimes sont là et ce n'est pas réparable. Si on ne peut pas excuser ces crimes, on peut toujours tenter de comprendre ce qui a conduit à leur commission. Et là, il faut bien tenter d'entrer dans la tête du coupable et d'imaginer les conflits internes et leur caractère inextricable. Parce que, dans le fond, quels étaient les choix possibles pour ce curé ? Croyant convaincu, il savait vivre dans le péché et devait déjà composer avec cela. On dira que croire en un dieu comme celui de la Bible impose, normalement et sauf cas particuliers, de ne pas tuer. Le Vatican, lui, ne voit pas d'un très bon œil l'idée qu'un curé puisse avoir des rapports sexuels et encore moins qu'un curé puisse être papa. Il y a bien la solution de devenir un curé défroqué mais, apparemment, elle est écartée rapidement. Le curé aurait pu partir, fuir. Il ne peut pas se suicider parce que sa religion ne l'autorise pas.
Aujourd'hui, je suppose que l'on excuserait encore moins les crimes d'un curé qu'autrefois. Lors du procès, le jury lui a trouvé des circonstances atténuantes (lesquelles ?) et lui a évité la peine capitale. Je suppose que nous serions nombreux à accepter (ou à s'en foutre) qu'un curé baise et donne naissance à un gosse mais que nous condamnerions les crimes.
Pour l'heure, je me demande encore quelle est la conclusion réelle de ce roman. Hubert Gonnet cherche-t-il à absoudre le curé d'une partie de ses crimes en faisant porter la faute au système du catholicisme ou cherche-t-il à montrer que la société a conduit à devenir curé un homme incapable de ne pas vivre sa vie d'homme et poussé à la folie meurtrière ? Il me semble que derrière tout cela il y a un procès de l'institution religieuse malgré tout. Ceci étant écrit, j'ai pris un plaisir réel à lire ce roman étonnant dans sa forme et très intéressant dans son fond.





